On prépare plusieurs séries d'articles de fond qui nous prennent plus de temps que prévu à écrire. Pour meubler un peu l'inactivité du blog, nous vous proposons de redécouvrir cet article qui reste d'actualité, on suppose, pour beaucoup d'hommes...

Nous recevons régulièrement des messages d’hommes (en anglais ou en français) qui n’arrivent pas à aborder leur désir de pegging à une femme, voire plus inquiétant à leur propre épouse. Or, cela nous parait tout à fait logique et normale, car cette pratique bouleverse complètement la vision d’un rapport sexuel entre un homme et une femme et va même plus loin, en s’opposant à l’image que la société réclame aux mâles…

Même si dans notre livre, nous abordons également le cas où c’est la femme qui est demandeuse, le cas le plus fréquent reste celui de l’homme demandeur. Aussi, nous allons essayer de comprendre pourquoi cela est si difficile pour une femme d’entendre un homme parler de pegging. Pour cela nous avons mandaté notre expert sur les questions féminines : Yvresse. Mais Songe y a aussi apporté sa petite contribution.

Ce billet s’adresse en premier lieu aux personnes qui n’ont pas encore connu l’expérience du pegging et qui le désire, sans savoir comment s’y prendre. Il s’adresse aussi à tous ces hommes qui n’osent en parler à leur épouse. Il s’adresse également à toutes ces femmes qui se trouveraient un peu perdues après une demande de leur mari ou conjoint…

Nous ne parlerons donc ici pas forcément à des couples hyper actifs sexuellement et en parfaite harmonie et très ouverts à toutes les pratiques sexuelles. Et nous allons en premier lieu prendre la défense de ces femmes pour mieux les comprendre et vous aider à franchir le pas ensemble.

Par ailleurs, comme nous parlons ces derniers temps surtout de thèmes "négatifs" autour du pegging, nous tâcherons également de nous intéresser prochainement à un thème positif, notamment à ce que gagne une femme à pratiquer le pegging sur un homme.  

Partie 1- L’état des lieux que la femme doit soudain affronter

1- Quelques préalables importants…

Avant de débuter, je dois dire que, de manière générale, l’homme est quand même super exigeant avec les femmes question sexualité. On trouvera toujours des exemples de femmes hyper actives qui ne pensent qu’à ça, mais elles sont certainement minoritaires et il est plutôt logique que la nature féminine ne pense justement pas qu’à ça ! Oui, messieurs ! Vous, vous avez votre testostérone qui vous sert à tout : développement musculaire, énergie sexuelle, agressivité pour s’imposer etc. C’est d’autant plus facile que vous en avez tout le temps à votre disposition. Je veux dire par là que votre sexualité n’est pas rythmée selon un cycle hormonal très complexe.

Quant à la femme, elle subit l’influence de plusieurs hormones qui vont agir profondément sur son corps et de manière très différente (jusqu’à influencer ses humeurs, et ça, vous l’aurez certainement noté, n’est-ce pas ?) mais pas de manière constante. Ou plus exactement, pas de manière uniforme dans le temps. Donc elle n’a pas la testostérone qui la titille tout le temps pour la faire bander. Il y a même des périodes où c’est même le contraire, elle ne se sent pas du tout d’humeur à batifoler. Et cela ne vient pas de son tempérament ou de sa personnalité mais de ses hormones. Songe m’avoue qu’après une éjaculation orgasmique, il vit lui aussi une période réfractaire, pendant laquelle l’idée même d’être touché lui est désagréable. Eh bien, une femme peut vivre ça pendant ses cycles, sauf que ça dure plus longtemps !

Quel est le rapport avec le pegging et la communication ? Vous ne voyez pas ? Tout simplement, vous ne pouvez pas demander à une femme qu’elle ait les mêmes envies que vous et qu’elle soit pareillement connectée cul comme vous. Certes, cela existe, mais ce n’est pas la majorité des femmes. Donc si vous n’êtes pas face à l’une d’elles, apprenez à baisser vos exigences quelque peu et à la comprendre. La communication passe par ça. De son côté, ne vous en faites pas, elle fait des efforts pour vous comprendre, même si parfois vous trouvez que cela n’est pas assez…

Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi trouver le bon moment (à la fois homonalement et à la fois dans l’esprit d’un dialogue constructif). Et puis, pour une femme, cette demande est très difficile parce que vous allez lui parler une langue étrangère, alors qu’il est fort probable que vous ayez développé tout un imaginaire sur la question (à force de mater du porno). Une femme ignore ce qu’implique de porter un phallus et encore moins de pénétrer un corps. Elle peut trouver ça excitant ou amusant ou, au contraire, trop extrême à son goût. Pour bien comprendre ces enjeux, nous vous invitons à lire notre livre quand nous développons tous les tabous et préjugés qui tournent autour du pegging (et certains billets du blog qui l’abordent aussi).

2- Une attitude défensive face à des attentes souvent énormes

Quelque part, il est assez logique que la femme ne dise pas « oui » tout de suite. D’abord, elle écume certainement moins que vous les sites à contenu pornographique (n’est-ce pas, Songe ?) et elle a besoin de se faire sa propre opinion sur le sujet. Si vous voulez lui expliqer pourquoi c’est bien et ce que vous attendez, vous ne faites que la piéger dans votre imaginaire érotico-pornographique.

D’autre part, même si ce n’est pas le cas, vous lui demandez à la fois d’endosser un nouveau rôle et surtout de projeter une excitation sur une image de l’homme très différente de ce qu’on lui a inculquée. On ne va pas se le cacher, le pegging joue très fort avec la notion de domination/soumission. Or, qu’on le veuille ou non, la société façonne plutôt des femmes soumises. Et elles-mêmes trouvent davantage d’attirance dans la soumission que dans la domination (d’où le large succès des Nuances de Grey and co qui a été pour grande partie porté par un public féminin). Il est même probable que ce rôle les déstabilise complètement et les rebute. Mais cela peut aller plus loin, non seulement elles n’ont peut-être pas envie de dominer, mais elles n’ont pas envie de voir un homme se soumettre à elles, tout simplement. Ce que l’homme imagine être excitant va au contraire les faires fuir !

Or, quand on jette un petit œil dans les tumblr de ces messieurs, on découvre que beaucoup d’entre vous fantasment sur des situations de soumission assez extrêmes (pas de jugement de ma part sur la question, bien entendu). Certes, il se peut que cela soit un monde fantasmatique qui n’a pas vocation à se réaliser, mais, si vous avez suivi la discussion et que Madame devine en vous ces choses inconscientes qui trottent dans votre tête (parce que la communication va toujours au-delà des mots), admettez que cette demande de pegging puisse être ressentie comme une agression…

Déjà, il y a de forte chance qu’elle ne pense pas assez au sexe selon vous (cf plus haut) et en plus vous voulez qu’elle remette en cause tout son érotisme ! Et puis, n’oubliez pas que la femme perd plus qu’elle ne gagne en matière de plaisir à vous sodomiser avec son gode-ceinture ! Clairement, en matière de pegging, le grand gagnant est l’homme. Bien sûr, la femme n’est pas forcément perdante sur toute la ligne, mais ce n’est pas forcément des arguments qu’elle sera prête à entendre au début.

3- Une femme parfois un peu perdue dans tous les rôles qu’on attend d’elle alors que le pegging lui en réclame un nouveau

Même si ce n’est pas forcément une demande de l’homme, il est vrai que la société exige beaucoup des femmes de manière soit explicite soit implicite. Et la femme a souvent à cœur de les remplir le mieux possible et culpabilise beaucoup quand elle ne se trouve pas à la hauteur (ou que l’homme lui fait discrètement comprendre). Et comme la société adore jouer avec l’image de la femme, elle se complait à lui en façonner des parfaites qui soient toujours sexy et toujours au top en toutes circonstances.

Au cas où vous ne le saviez pas, une femme doit être : une maîtresse de maison accomplie, une épouse attentive, une amante passionnée, une professionnelle efficace et puis un jour, elle doit aussi être mère attentionnée. Beaucoup de femmes « segmentent » dans leur tête ces rôles (chose que l’homme semble vivre de manière plus naturelle). Et comme il y en a beaucoup et que certains sont plus ou moins prenants et qu’une journée ne fait que 24h… il y en a fréquemment qui sont mis de côté…et pour certaines, ce sera celui d’amante quand viendra le soir, car les autres l’auront déjà épuisée ou continueront d’occuper son esprit quand elle regagnera le lit…

Et puis, celui de mère change encore plus de choses. Soudain, on devient mère quasi à plein temps. Or, l’image de l’amante vient parfois court-circuiter ce rôle. Il y a des choses que l’on fait qu’on n’aimerait pas laisser voir à ses enfants. Et il est difficile de passer au rôle d’amante passionnée et ardente quand on a encore la tête l’image d’un petit bout de chou qui vous réclame un dernier câlin (ou pire, quand il est malade !)… En tout cas, moi, j’ai parfois du mal de passer de l’un à l’autre…

Et puis, le pegging vient rajouter un nouveau rôle à notre panoplie déjà bien chargée : celui de la dominatrice ! Et là, cette personne en face de vous est tout à fait en droit de dire : « Heu… vu mon agenda, ça va être chaud à caser, chéri… Repasse le mois prochain, je verrai si j’ai créneau ».

Conclusion : pour aider une femme à envisager le pegging tel qu’il l’envisage, l’homme a intérêt d’aider et soulager le plus possible sa petite femme sur ses autres rôles (notamment celui de maîtresse de maison et de mère). Pour qu’elle soit connectée sexe, elle aura besoin d’avoir l’esprit le plus libre possible. Pensez-y, avant de penser au cahier des charges du pegging dont vous rêvez.

Et le pire pour une femme sera de se sentir jugée si jamais elle refusait de céder à cette demande. Elle sait pertinemment qu’elle vous aura frustrée, qu’elle n’est décidemment pas à la hauteur de vos attentes, qu’elle ne vous comprend jamais etc.  Et dîtes-vous que cela lui fait certainement peur. Et en même temps, elle a le sentiment que vous ne la comprenez pas non plus… Pour ça, pensez à tous ces rôles qui encombrent sa tête.

Partie 2- Un peu de lucidité sur ce qu’implique une demande par un homme de vivre le pegging avec une femme

1- Et au final, du pegging, OK, mais pour gagner quoi ?

Pour ma part, je crois que les hommes font une immense erreur d’appréciation. Comme je l’ai signalé sur notre précédent billet sur le Mythe du phallus, l’homme tend à surestimer nos désirs en y substituant ce que lui imagine à notre sujet (en faisant court, en y plaçant ce que lui vit avec sa propre bite). Il ne faut pas oublier que, dans l’affaire, la femme ne gagne pas grand-chose (à part porter la culotte si c’était ce qu’elle avait envie).

A dire vrai, elle perd même plutôt pas mal de choses :

-          Une image de l’homme fort et protecteur

-          Son plaisir sexuelle féminin (même s’il peut y avoir quelques compensations)

-          Le plaisir de se soumettre et de laisser l’homme la guider dans ses jeux

-          Une image d’elle-même avec laquelle elle s’identifie facilement

Et qu’est-elle censée gagner à la place ?

-          Une pression supplémentaire pour être à la hauteur des fantasmes de monsieur

-          L’angoisse d’être en situation de dominer l’autre (alors qu’on ne s’y sait pas enclin)

-          Un homme qu’elle doit soudain martyriser

-          Et un éventuel machin en latex potentiellement plus gros que la bite dans le pantalon de son vis-à-vis (et encore, pas forcément au tout début ^-^)

Voilà pour le tableau noir. J’insiste sur les mauvais aspects du pegging exprès pour que ces messieurs comprennent un peu mieux les enjeux de leur requête et soient un peu plus compréhensifs. Et j’admets y mettre de la mauvaise foi. Mais je suis là pour vous aider et montrer à Madame qu’elle est normale de vous rembarrer sur le pegging ! Mais comme notre but est d’aider votre couple à la vivre, comptez sur nous aussi pour vous donner un coup de pouce. Seulement, avant de parler pegging à une femme, soyez sûr de connaître tous les enjeux ce que vous lui demandez.

Si vous avez un cahier des charges pour madame pour vivre le pegging, cette dernière est en droit de le faire pour vous, même si cela doit vous frustrer dans votre désir de vivre votre rêve de pegging à vous. Seulement, pour qu’une femme accepte de se livrer ainsi à son tour, elle doit être sûre d’être entendue, respectée et surtout de ne pas se sentir jugée.

Peut-être qu’elle ne sera pas comme cette pornstar que vous avez vue ici ou là ? Et alors ? Elle, on ne la paie pas et elle ne triche pas. Elle vit dans la vraie vie. Elle n’est pas qu’une pornstar à l’écran, mais le plus souvent une épouse, une mère, une professionnelle et une amante qui essaie de se donner à vous le mieux qu’elle peut. Elle est authentique. Cela ne le rend que plus admirable. Elle ne sera peut-être pas la meilleure dans le rôle que vous attendez, mais peut-être est-elle la seule à pouvoir les concilier tous de la sorte pour vous satisfaire malgré tout quand vous n’écoutez plus ce que vous dit votre testostérone ?

2- Comment se rapprocher d’elle pour faciliter le dialogue ?

La première chose qu’il nous parait nécessaire pour parler pegging avec une femme est de bien comprendre ce que vous allez lui demander. Il ne s’agit pas uniquement d’enfiler un harnais pour qu’elle vous pénètre avec un gode. Vous lui demandez de changer d’image, d’incarner un nouveau rôle et d’admettre des choses qu’elle ignore en vous (et parfois sur elle). Elle découvre peut-être qu’elle ne vous connait pas et cela peut lui faire peur. N’oubliez pas que vous l’entrainez ni plus ni moins dans l’inconnu le plus total.

Nous avons conçu notre guide du pegging amoureux justement pour aider les femmes à ce que tout ceci ne soit pas aussi nébuleux et qu’elles puissent en douceur se familiariser avec l’univers du pegging. Et ce, sans forcément mettre l’accent sur la Domination/Soumission qui peut les effrayer.

L’autre point qui nous parait très important, c’est que la femme va avoir besoin d’être rassurée sur plein de sujets :

-          D’abord, sur votre souhait plus ou moins grand de soumission. Apprenez dans un premier temps à le mettre de côté (sauf si vous êtes face à une vraie dominante, mais généralement, cette femme va plutôt se jeter sur l’occasion plutôt que l’inverse). Cela veut aussi dire que vous devez baisser vos exigences de la voir endosser le rôle de dominatrice (et encore plus avec la tenue qui va avec). Vous avez tout le temps pour ça.

-          Il faut aussi qu’elle découvre qu’elle ne sera pas forcément toute seule à oser pénétrer un homme et que des femmes « normales » le font. Par « normales », j’’entends du genre pas spécialement « Domina and co » (encore une fois, pas de jugement de valeur ici pour autant). Or, il est très difficile de trouver des témoignages de telles femmes et surtout des images, car on met systématiquement en avant ou en scène les (soit disant) penchants féminins de dominantes. D’où notre travail sur tumblr pour essayer de proposer une vision du pegging plus tendre. D’où également notre livre qui s’attache à donner à la fois la vision de l’homme et de la femme sur chaque chose.

-          Je viens de lâcher le mot « tendre ». Une femme est généralement plus sensible à la tendresse que les hommes, tout simplement parce que son érotisme est certainement plus tactile que visuel (en tout cas, moi, je suis comme ça). Donc, une main qui caresse ma peau me fait plus d’effet qu’un gros plan d’une bite en train de pénétrer une chatte ou un gros gode en train de défoncer le cul d’un mec soumis plus ou moins ligoté en train de couiner. C’est pourquoi nous avons développé le concept de « pegging amoureux ». Le pegging peut être effectivement vigoureux et s’inscrire dans une vision D/S, mais il peut être aussi pour le couple (et la femme) une nouvelle façon de faire l’amour. En tout cas, c’est ce que nous avons essayé de développer dans notre guide et qui nous parait plus propice à l’imaginaire des femmes. Or, avouez que cela n’est peut-être pas votre plus grand fantasme, toute cette tendresse dans le pegging ?

-          Vous devez également expliquer que le pegging ne va pas forcément tout chambouler votre sexualité et les rôles de chacun dans la vie de tous les jours. Aussi loin qu’un couple ira dans ses fantasmes, il convient de dire que le pegging va créer un monde à part qui n’a pas obligatoirement vocation à perdurer. C’est avant tout un jeu érotique avant un mode de vie ! Le point important est de lui faire comprendre qu’elle ne va pas perdre l’homme qu’elle aime si jamais elle le pénètre. Si elle a besoin d’un mec fort qui la protège, elle doit être sûre de le retrouver après, même s’il s’est comporté pendant un laps de temps plus ou moins comme une lopette… Il faut qu’elle sache que cela peut être aussi une façon pour vous d’évacuer la pression qu’il ressent à incarner cet homme fort que tout le monde réclame de lui (C’est Songe qui me glisse ça à l’oreille). Après, il s’agit d’un équilibre à construire dans votre couple de manière à ce que tout le monde y trouve son compte et que personne ne se sente perdu ou piégé.

-          Enfin, la femme va avoir besoin de repères. C’est un rôle nouveau qui l’attend. Un peu dominatrice, comme on l’a dit, mais également un peu « homme ». Et pour ma part, j’y découvre aussi une hyperféminité dans le désir de l’homme de nous vénérer quelque peu (et aussi bizarre, il y a de quoi avoir peur d’être soudain au centre de toutes les attentions, tout en se disant qu’on n’est peut-être pas aussi sexy que toutes ces femmes qu’on trouve dans tumblr quand elle se drape de noir et de cuir ou de latex). Or, pour jouer tous ces rôles et gérer toutes ces images, il faut un peu d’habileté, de l’imagination et de beaucoup de complicité. L’homme doit à la fois la guider vers ce qu’il veut mais également l’aider à se découvrir elle-même pas à pas, en respectant ce qu’elle est et ce qu’elle désire et, surtout, ce qu’elle ne veut pas. Peut-être d’ailleurs que cela changera avec le temps. Donc prenez votre temps.

Si vous trouvez des réponses à chacun de ses sujets, vous aurez ainsi bien préparé e terrain et vous aborderez le pegging vis-à-vis d’elle comme expérience beaucoup plus positive. Bien sûr, notre guide vous apportera peut-être des solutions auxquelles vous n’aurez pas pensé (et d’autres articles que nous avons déjà publiés pourront vous aider), mais il ne remplacera pas cette investigation personnelle. Vous seul connaissez (ou du moins croyez connaître) la personne en face de vous et gagnerez d’autant plus en pertinence le jour J.

3- L’illusion masculine de la bonne écoute (par Songe)

Je vais ici vous parler des erreurs que j’ai certainement commises lors de mon premier mariage, quand j’ai voulu vivre le pegging avec ma première épouse (et Yvresse a elle aussi quelque peu connu ça)

L’un des points qui nous parait le plus important et qui nous a chacun fait défaut lors de notre premier mariage est de trouver des mots qui ne soient forcément ceux de l’autre, mais des mots qui seraient capables à la fois de la comprendre et de lui montrer ce qui l’attend sans la heurter et la bousculer. Pourquoi le partenaire masculin, aussi à l’écoute soit-il, n’est peut-être pas le bonne interlocuteur ? Dans les faits, l’homme, même s’il veut se soumettre, peut très bien être un dominateur caché. Je veux dire que la femme devra souvent se plier à ses exigences de soumission à lui plutôt qu’à ses envies à elle de domination. Donc, dans les faits, elle se trouve dans la situation de soumise une fois de plus… Sauf qu’ici, l’homme la manipule (plus ou moins inconsciemment)…

Donc pour éviter cette désagréable sensation de se faire avoir et pour lui permettre de se faire sa propre vision du pegging, la femme doit pouvoir se forger une propre opinion, sans avoir à se plier aux propos plus ou moins compréhensifs de l’homme. Elle doit pouvoir chercher un contenu qui ne soit pas systématiquement celui que son partenaire lui aura choisir pour façonner ses envies (ou plus exactement la forcer à accepter ses fantasmes à lui). Là aussi, nous avons travaillé notre guide pour l’aider à se forger un regard qui lui soit plus personnel et qu’on ne trouve d’ailleurs pas forcément facilement sur le net. Et puis, parfois, la même phrase prononcée dans une autre bouche prend soudain tout son sens, tout simplement parce qu’on ne vit pas tous les jours avec et qu’on n’y projette pas tout ce qu’on sait ou croit savoir sur lui, qui vient court-circuiter le dialogue.

Un autre point important : en matière de communication, ce n’est pas parce qu’on ne dit pas les choses que l’autre ne les entend pas. Je m’explique. Certains hommes ont un vif désir de soumettre à une femme, tant pour le plaisir de voir cette femme se transformer en dominatrice (qui n’est qu’une variation de la femme fatale). Et ces besoins sont parfois si forts en lui que cela transparait. Même si la femme ne le comprend pas, elle sent très bien qu’il y a d’énormes attentes latentes autour du pegging. En clair, elle comprend que ce n’est que la partie visible de l’iceberg. C’est pourquoi cette demande peut aussi l’effrayer et la pousser à refuser.

Vous n’avez pourtant rien dit de tout ça, et vous vous dîtes qu’elle ne vous comprend pas… Or c’est peut-être l’inverse : elle vous comprend trop bien. Intuitivement, elle sent ce que vous attendez d’elle. Elle sent qu’il y a comme un piège qui l’attend si elle disait « oui ».

Enfin, même si vous être parfaitement à l’écoute, que vous employez des mots justes, etc. (je pense que beaucoup d’hommes se surestiment sur le sujets parce qu’ils ne voient combien leur « objectivité » est court-circuité par leur regard de mâle), vous avez certainement vécu une situation où vous donniez un conseil ou un argument et que Madame refusait en bloc. Puis, un jour, une autre personne (ou un livre) lui dit la même chose et, soudain, elle est d’accord.

Son attitude est normale, face à vous, elle est sur la défensive. Et elle vous connait par cœur (du moins, le croit-elle tout comme vous le croyez à propos d’elle). Elle n’a pas envie de perdre la face ou de céder une nouvelle fois à vos envies de jeux sexuels parce qu’elle estime qu’elle fait déjà plein d’efforts et que vous n’êtes jamais content. Donc si c’est pour en faire plus, en sachant en plus qu’elle ne sera pas à la hauteur de vos attentes (plus ou moins cachées) sur une pratique qui ne lui parle pas, le plus simple est de s’abstenir. Encore une fois, c’est pourquoi notre guide peut être un précieux allié. D’abord, il essaie de présenter le pegging dans toute sa complexité et à la fois dans sa grande simplicité. Et puis, nous essayons de montrer que ce jeu débouche sur une relation gagnant/gagnant. Enfin, il y le regard et les mots d’Yvresse qui sont là pour la rassurer quant à ses logiques appréhensions.

Petite remarque d’Yvresse :

Je l’indique quelque peu dans le livre mais, moi aussi, j’ai essuyé un premier refus. Pour tout vous dire, un point que je n’ai pas dit, c’est que le point de départ de cette envie avait été une requête de mon premier mari de m’investir davantage dans notre sexualité. Et un jour, je suis tombée sur un article sur le plaisir prostatique (c’était sur le site Les Nouveaux Plaisir). Très fière de moi, j’ai voulu le faire vivre à mon homme. Il faut dire que cette découverte avait réveillé plein de choses enfouies dans ma tête (que j’évoque dans le livre). Seulement mon mari a refusé. Je l’ai très mal vécu, car il avait tendance à me mettre beaucoup de pression pour vivre une sexualité plus intense et j’avais tendance à culpabiliser sur le sujet. Et il se trouve que j’avais fini par développer un vrai fantasme.

Tout ça, pour dire, que l’homme met une bonne pression sur la femme sans s’en rendre compte, alors que celle-ci subit pour partie l’influence de ses hormones (alors mêmes que les besoins sexuels de l’homme sont liés à elles sauf que lui ne s’en rend compte). Et il doit avoir conscience de la relative culpabilité portée par la femme.

Il y a un autre point que je vous demande d’avoir en tête. Une vraie dominatrice a bonne presse dans l’imaginaire des hommes. Elle les fascine. Mais une femme qui avoue ne pas se sentir une âme de grande dominatrice, qui expose ses doutes, ses limites, mais également ses découvertes, ses excitations et l’évolution de son regard ne va pas forcément aider l’homme à vivre immédiatement ce qu’il imagine. Mais pourtant, cela va aider le couple à se rapprocher. C’est pourquoi j’ai essayé de dire des choses qu’on ne dit pas forcément. J’admets tout à fait ne pas être la dominatrice que Songe s’amuse parfois à mettre en scène sur tumblr, mais je n’ai plus l’âge de ces femmes et ni leur corps. Il le sait et l’accepte (mais je ne peux pas l’empêcher de fantasmer, bien entendu). Mais j’apprends, je progresse et me découvre.

Il faut dire j’ai compris que je n’avais pas à être comme elle pour de vrai. Le pegging peut être un vaste jeu. Et dans ce jeu, chacun est libre d’explorer les recoins cachés de sa personnalité à la condition qu’ils soient compatibles avec ce que le partenaire souhaite vivre et faire vivre.

Conclusion

En fonction de la personne qui est en face de vous, tous ces points seront plus ou moins pertinents. Mais si vous lisez cet article, c’est que justement vous êtes certainement confrontés à de telles difficultés de dialogue. Or celui est crucial si vous souhaitez passer un bon moment.

Si le billet a un contenu un peu négatif, il est surtout porteur d’espoir. Toute femme peut découvrir qu’il y a un authentique plaisir à pratiquer le pegging. Ce dernier se trouve notamment dans l’excitation de donner un plaisir si à part à son partenaire, dans la découverte de soi et de l’autre, et également dans l’incarnation d’une femme différente et plus unique, qui fait que cette femme ne ressemblera plus aux autres. Cette femme aura soudain permis de faire découvrir et vivre à son homme un fantasme très puissant que toutes ne sont pas prêtes à consentir.

Mais cette découverte est très complexe. C’est pourquoi nous avons écrits non pas un tome mais deux, car elle nécessite d’aller beaucoup plus loin que tout autre jeu érotique. Si nous avions réduit notre ouvrage à un seul tome, il se serait contenté des habituels lieux communs. En essayant de vous apporter l’éclairage de ce que vit l’homme et de que vit la femme, le livre vous donne une plus grande compréhension de ce que cache le pegging dans la tête de chacun.

Même si une femme se dit que le pegging n’est pas fait pour elle, elle le refuse avant tout par peur de l’inconnu et de ce qu’elle y découvrira en vous et, peut-être, en elle. Mais pas seulement. Le pegging touche parfois le cœur de l’édifice qu’elle se sera construit et il est logique qu’elle n’ait pas envie que tout s’écroule. Seulement, il lui faudra admettre que la sexualité n’est pas là uniquement pur nous enfermer dans ce que nous croyons être mais aussi pour nous faire découvrir qui nous sommes, au-delà des apparences et des schémas préétablis. Le pegging, en nous faisant plonger dans l’inconnu, est aussi là pour aider le couple à se bâtir un monde à lui et où il est plus que jamais libre de vivre et d’être qui il lui plait, sans rendre de compte à l’univers tout entier, tout en se créant une intimité plus forte et plus complice. Chacun de vous va dévoiler à l’autre des facettes que peu de personnes connaissent. L’autre devient plus qu’un partenaire de jeu, mais un guide (parce qu’il connait soit la féminité cachée de l’un ou la masculinité cachée de l’autre) et un témoin privilégié qui le rend encore plus unique.

Le pegging peut bien sûr déstabiliser un couple, mais il peut aussi l’aider à être plus fort, parce qu’il devient son secret à lui. En tout cas, nous en avons fait l’expérience et c’est ce que nous avons voulu transmettre à travers notre livre.